C’est connu, le français est une langue difficile à écrire, et elle l’est aussi au niveau typographique. Tirées du Petit vade-mecum de l’édition, voici quelques erreurs à éviter pour maîtriser les codes de l’édition et briller dans les dîners en ville!
1. L’espace fine
L’espace fine est utilisée avant les points d’interrogation, les points d’exclamation, les points-virgules, les deux-points, ainsi que pour les guillemets. Elle prend la forme d’une espace plus étroite que l’espace standard. Néanmoins, son usage fait débat au sein du milieu de l’édition, car elle est surtout utilisée en Suisse romande, tandis que les Français lui préfèrent l’espace standard.
Le coin pinaillage: ni les logiciels de traitement de texte ni les logiciels de gestion de site web (à l’instar, sur ce site, de WordPress) ne tiennent compte de cette subtilité typographique. D’où l’absence regrettée d’espaces fines dans cet article.
Le coin pinaillage (bis): utilisé dans le contexte typographique, le mot «espace» est féminin.
2. L’apostrophe courbe
En français, on utilise l’apostrophe courbe / ’/, et non pas l’apostrophe anglo-saxonne droite / ‘ /. Il ne faut pas non plus la confondre avec le prime / ′ /, utilisé notamment en mathématiques.
Le coin pinaillage: pour l’écriture web, il s’agit d’une règle difficile à appliquer, car les logiciels de gestion de site (à nouveau, comme WordPress) sont d’origine anglo-saxonne et ne tiennent pas compte de la différence entre les deux apostrophes. Pour respecter les usages de l’édition, une solution s’impose: la bonne vieille technique du copier-coller.
3. Les guillemets
Dans l’édition de textes en français, on utilise les guillemets en chevrons doubles et non pas les guillemets en virgules à l’anglaise, ni les guillemets inversés à l’allemande. En revanche, pour citer à l’intérieur d’une autre citation – «Et l’éditeur s’écria: ‘ils sont pénibles avec leurs règles typographiques!’ avant d’éteindre son ordinateur avec humeur.» –, on utilise les guillemets simples ou les chevrons simples.
Le coin pinaillage: pour compliquer encore un peu les choses, les Suisses alémaniques n’utilisent pas les guillemets inversés à l’allemande, mais les chevrons doubles à la française. Allez comprendre!
4. Les majuscules accentuées
Il s’agit d’un point sur lequel l’édition suisse a longtemps fait de la résistance. Il est désormais d’usage d’accentuer les majuscules en début de mot comme «État» ou «Éditions Loisirs et Pédagogie». Compte tenu des malentendus que le manque d’accent peut engendrer, les Suisses romands se sont résolus à suivre les règles typographiques en vigueur en France. À bon entendeur, donc!
5. L’écriture inclusive
Dit-on «des ouvrages destinés aux enseignantes et enseignants»? «Aux enseignant-e-s»? «Aux enseignant.e.s»? Et, d’ailleurs, dit-on une auteur, une auteure ou une autrice? Autrefois très réticente à l’idée d’accepter ces termes, l’Académie française adhère aujourd’hui à la féminisation des noms de métiers et de fonctions. Toutefois, il n’existe pas encore de règles unifiées pour l’écriture inclusive. Pour leur part, les Éditions Loisirs et Pédagogie tentent de suivre le principe suivant: écrire de façon non sexiste sans alourdir inutilement le texte. Ici, on aurait donc écrit «des ouvrages destinés au corps enseignant», non sans faire pousser quelques cheveux blancs!
6. La césure
Selon les règles en vigueur dans l’édition, la coupure – ou césure – des mots d’un texte obéit à de nombreuses règles. En premier lieu, elle doit respecter la division syllabique. Parfois, la division étymologique est aussi possible – par exemple pour «micro-scope». Par ailleurs, les syllabes muettes en fin de mot – comme dans «exem-ple» – doivent rester dans un groupe d’au moins trois lettres.
7. L’élision de l’apostrophe
Dit-on «cet atlas de Arthur Escher et Robin Marchant est passionnant»? Ou «cet atlas d’Arthur Escher et Robin Marchant est passionnant»? En français, l’usage typographique veut qu’on fasse l’élision de l’apostrophe devant les voyelles. Toutefois, cette règle est soumise à quelques exceptions contre-intuitives.
Le coin pinaillage: cette règle n’est pas valable pour les élisions suivant les expressions «puisque», «lorsque» et «quoique». Néanmoins, si cet usage est recommandé par Le guide du typographe, il est contesté par Le Grevisse.
8. L’écriture des chiffres et des nombres
Dans les textes imprimés, l’usage éditorial est d’écrire les quantités en chiffres et les durées en lettres, à l’instar des phrases suivantes: «La maison d’édition existe depuis quarante ans. Elle a publié 3000 ouvrages.» Par ailleurs, en français, on écrit 20’000 ou 20 000 – et non pas, à l’anglaise, 20,000.
Le coin pinaillage: dans le jargon de l’édition, le numéro de page est appelé «folio».
Un viatique de l’éditionLe petit vade-mecum de l’édition présente règles linguistiques, usages typographiques et jargon technique de manière décomplexée et humoristique. Destiné à toute personne amenée à travailler avec des textes et des images, ce cahier à glisser dans sa poche et garder sur soi en toutes circonstances vous permettra de ne plus jamais commettre de maladresses éditoriales. |
Pour aller plus loin
- Suivez notre saga, les «Chroniques de l’édition»
- En mai 2019, les Éditions Loisirs et Pédagogie fêtaient leur quarante ans
- Le petit vade-mecum de l’édition paru à cette occasion