Près de cent ans après sa mort, beaucoup d’encre a coulé sur Rudolf Steiner, pédagogue d’origine austro-hongroise né en 1861. Fondateur de l’anthroposophie, il a légué une pédagogie dont se revendiquent les écoles «Steiner-Waldorf» partout dans le monde. Tantôt qualifiée de visionnaire ou d’ésotérique, d’utopiste ou carrément de sectaire, elle défend une alternative à l’école publique, un idéal d’éducation centré sur le potentiel naturel de l’enfant, dépourvu de notes et de compétition. Que le personnage dérange ou fascine, voici quelques faits surprenants à son sujet.
1. Il a trouvé sa vocation de pédagogue en enseignant à un élève hydrocéphale
En 1879, Rudolf Steiner s’inscrit à la Haute école technique de Vienne. Issu d’une famille modeste, il doit travailler pour financer ses études. C’est en 1884 qu’il se familiarise avec la pédagogie, en devenant le précepteur d’un enfant souffrant d’hydrocéphalie – une anomalie définie par un excès de liquide dans les cavités du cerveau – dont la capacité d’attention réduite a mené à une déscolarisation. Steiner prépare des cours adaptés au rythme de son élève, présentant peu de matière à la fois, afin d’améliorer ses capacités d’apprentissage. Suite à ce premier enseignement, Steiner réitérera l’expérience en donnant dès 1899 des cours oratoires aux ouvriers de l’Université populaire de Berlin.
Steiner prépare des cours adaptés au rythme de son élève, présentant peu de matière à la fois, afin d’améliorer ses capacités d’apprentissage.
2. Il a édité les œuvres de Goethe
Alors qu’il est encore étudiant, son professeur de littérature, Karl Julius Schröer, lui demande de participer à la première édition de l’œuvre complète de Goethe. Si le célèbre intellectuel allemand a durablement marqué le domaine littéraire à travers ses romans, poèmes et pièces de théâtre, une partie de ses écrits sont de caractère scientifique. Ainsi, il s’est notamment intéressé au monde végétal (La métamorphose des plantes, 1790), à la minéralogie et à la nature des couleurs (Le traité des couleurs, 1810). L’influence de certaines idées développées par ce maître à penser est manifeste à travers le nom que Steiner donnera à l’école construite à Dornbach, en Suisse: le Goetheanum.
3. Il a construit sa propre école dans le Jura suisse
Au terme de son séjour berlinois, Steiner recherche un endroit pour accueillir les activités de la Société anthroposophique, qu’il vient de créer. Un de ses disciples suisses, le docteur Grossheintz, lui propose un terrain à Dornach, aux portes de Bâle et face au Jura. En 1913, la construction de son école, le Goetheanum, débute. Elle durera neuf ans. Alors que la Première Guerre mondiale fait des ravages de l’autre côté de la frontière, les anthroposophes œuvrent à l’édification de leur architecture idéale. Avant-gardiste, doté de coupoles et complètement construit de bois, l’édifice souhaite refléter le cœur de la pensée spirituelle formulée par Steiner – son cœur est notamment une grande salle de fête, censée rassembler les activités de l’école. Détruite peu après son ouverture dans un incendie criminel en 1922, elle sera reconstruite, cette fois en béton.
4. Les écoles Steiner-Waldorf sont nées dans une fabrique de cigarettes
Les écoles se revendiquant de la pédagogie Steiner portent souvent le nom «Steiner-Waldorf». Le deuxième patronyme vient de l’ancienne fabrique de cigarettes Waldorf-Astoria, située alors à Stuttgart et dirigée par Emil Molt. Peu conventionnel, le patron souhaite concrétiser une idée inédite pour l’époque: créer une école pour les enfants de ses employés. Il demande à Steiner d’en assurer la direction. La première école «Waldorf» ouvre en 1919. C’est à cette occasion que Steiner édicte les principes de sa pédagogie, fondée sur un modèle participatif, où parents et enseignants sont partie prenante du projet d’éducation. Il décédera seulement cinq ans plus tard, en 1925, à l’âge de 64 ans.
Les écoles «Steiner-Waldorf» ont essaimé sur les cinq continents.
5. Les écoles Steiner sont désormais présentes sur les cinq continents
La mort prématurée de Steiner n’empêche pas sa pédagogie de se développer. Cent ans après l’ouverture de la première école à Stuttgart, quelque 1092 écoles sont aujourd’hui labellisées «Steiner-Waldorf». Si le mouvement est d’abord parti d’Europe, les écoles ont essaimé sur les cinq continents, en Chine, en Afrique du Sud, en Israël, en Argentine, en Égypte et aux Philippines notamment. En dépit des différentes façons d’adopter la pédagogie développée par Steiner, inhérentes à la culture de chaque pays, toutes poursuivent cet idéal édicté par le fondateur de l’anthroposophie: développer l’universel humain qu’est l’enfant, dans un idéal pédagogique prônant la liberté de l’apprentissage.
Ils mettent le p dans Loisirs et Pédagogie: la collection Les grands pédagoguesLes Éditions Loisirs et Pédagogie rendent hommage aux grands pédagogues. Depuis 2015, elles ont consacré un ouvrage à Pestalozzi, Freinet, Girard et, cette année, à Rudolf Steiner. Vous trouverez plus d’informations sur notre catalogue. |
Pour aller plus loin
- Steiner, Jean-Claude Hucher, 116 pages, 2019
- Collection Les grands pédagogues, parue aux Éditions Loisirs et Pédagogie