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5 faits surprenants que vous ignorez (probablement) sur les abeilles

par | 27 avril 2020 | Arthur Jetzer, Découverte de la Suisse, Découvertes, Walter Leuthold

Seules les plus vieilles ouvrières s’attellent au butinage, ramenant le nectar des fleurs dans leur trompe et le pollen sous leur abdomen et sur les pattes. En se déplaçant, elles entraînent ainsi la pollinisation des fleurs. © Photo Pixabay
Notre guide Passeport nature permet d’aller à la rencontre de la faune et de la flore indigènes. Alors que le printemps revient, coup de projecteur sur l’un des êtres les plus prodigieux de nos régions: la petite abeille européenne.

Comme les hirondelles, elles annoncent le printemps – peut-être plus. Petit insecte terrifiant pour certains, fascinant pour d’autres, l’abeille européenne – ou apis mellifera – vit depuis des milliers d’années aux côtés de la société humaine, qui l’a domestiquée pour son miel. Pourtant, elle nous précède de très loin. Née avec les dinosaures il y a plus de 100 millions d’années, durant le Crétacé, elle a évolué en symbiose avec les premières fleurs, fécondées de manière accidentelle lorsqu’elle butine et disperse le pollen charrié sur ses pattes. Et pour cause, ce serait plus de cent mille espèces de plantes qui disparaîtraient si les abeilles venaient à s’éteindre. Alors que leur existence est menacée par l’usage de pesticides et la prévalence des parasites, petit florilège de faits surprenants pour mieux comprendre l’étonnante mouche à miel.

Plus de cent mille espèces de plantes disparaîtraient si les abeilles venaient à s’éteindre.

1. Elles sont fécondes même vierges

À la différence des ouvrières, la reine est le seul membre de la ruche à posséder la faculté de pondre des œufs mâles et femelles. Ainsi, elle a une taille plus grande, des ovaires plus développés, tandis que la multitude de ses filles et sœurs sont dotées d’organes reproducteurs, d’un plus grand cerveau et d’un corps plus petit, apte aux besognes du butinage et de la construction des rayons des cires. Surtout, elle vit quatre ou cinq ans, alors que les ouvrières ne vivent que six à sept semaines. Cette différenciation est due au régime que les abeilles prodiguent aux larves. En effet, les reines en devenir sont nourries uniquement de la «gelée royale» sécrétée par les nourrices, tandis que les larves d’ouvrières subsistent uniquement de miel et de pollen après quelques jours. À peine sortie de sa cellule, la première née des nymphes royales s’attellera à massacrer ses sœurs en rongeant leurs couvains de cire, à moins que les ouvrières ne l’en empêchent.

En fait de reine, il s’agit davantage d’une souveraine-esclave dotée d’un abdomen géant, qui passe sa vie dans l’ombre, à enfanter infatigablement une nouvelle descendance pour assurer la survie de l’espèce. Pourtant, si elle n’est pas fécondée par un faux bourdon, la reine peut pondre uniquement des œufs mâles, sa spermathèque restant incomplète. Une aptitude étonnante, que partagent les ouvrières, qui peuvent aussi pondre dans les alvéoles une nouvelle génération de faux bourdons malgré leurs ovaires atrophiés. Cet instinct se déclenche souvent quand l’avenir de la ruche est en danger, puisqu’elles tentent ainsi de donner naissance à des mâles capables de féconder une nouvelle reine.

2. Elles se métamorphosent complètement au cours de leur vie

Tout comme les papillons ou les mouches, et contrairement aux humains, les abeilles se métamorphosent plusieurs fois au cours de leur vie. En effet, de nombreux insectes vivent la majeure partie de leur vie sous forme de larves voraces, dont le but premier est d’emmagasiner assez de ressources pour amorcer la prochaine étape de leur existence. Puis, la plupart des espèces forment un cocon où elles atteignent le stade de pupe, ou de nymphe (la chrysalide chez le papillon). C’est lors de cette seconde métamorphose qu’elles atteignent leur état imaginal, soit leur forme adulte.

À peine sorties de leur alvéole, elles se mettent directement à l’ouvrage. Contrairement aux fourmis, les abeilles adoptent des taches différentes au cours de leurs vies. Ainsi, elles nettoient tour à tour les cellules de la ruche, développent les glandes dédiées pour nourrir les nouvelles larves et créer la cire pour agrandir les rayons. Puis, elles sont confinées à la transformation du nectar en miel, à la garde de l’entrée contre les prédateurs et à la ventilation de la ruche pour en maintenir la chaleur. Aux alentours de son quinzième jour d’existence, l’ouvrière effectue son premier vol pour finir sa vie en tant que butineuse, mourant souvent de faim et d’épuisement loin de la ruche. Une logique implacable, mais qui prend tout son sens chez une espèce où l’individualité ne compte pas et où chaque membre, mâle ou femelle, sert au bon fonctionnement du grand organisme de la ruche.

3. Elles construisent les rayons de la ruche avec une substance qu’elles sécrètent

À l’état sauvage, les abeilles vivent dans des trous d’arbres, où elles déploient aussi leur aptitude incroyable à construire des rayons à l’aide de la cire qu’elles sécrètent. En effet, chaque ouvrière est dotée de glandes cirières, qui lui permettent de perfectionner les rayons de la colonie. C’est à l’intérieur de ces derniers qu’elles entreposent leurs récoltes de miel et élèvent le couvain où sont élevées les larves des mâles, des femelles et des nymphes royales.

Abeilles et alvéoles

Les abeilles forment des rayons de forme hexagonale à l’intérieur de la ruche, une géométrie naturelle presque parfaite. © Photo Pixabay

Au-delà de cette faculté étonnante, les rayons sont d’une forme hexagonale quasi parfaite, bien que les abeilles en varient à certains endroits la largeur pour pouvoir y passer dos à dos. Dans son livre La vie des abeilles, le prix Nobel de littérature belge et apiculteur éclairé Maurice Maeterlinck détaille l’ingéniosité de ces constructions, uniques dans la nature et comparables aux prouesses architecturales de l’homme. Il rappelle que ces rangées d’alvéoles hexagonales sont si régulières qu’elles ont été proposées comme étalon naturel de référence par le savant français René-Antoine Ferchault de Réaumur lors de l’introduction officielle du système décimal en France à la fin du XVIIIe siècle.

4. Elles génèrent de la chaleur avec les muscles de leurs ailes

À l’intérieur de la ruche, un grand nombre d’ouvrières est constamment mobilisé pour maintenir la température de la ruche entre 25 et 30 degrés. Pour ce faire, elles ventilent l’air en utilisant les muscles de leurs ailes. Lorsqu’elles hibernent pour l’hiver, les abeilles se rassemblent en couches autour des rayons scellés de miel, avec, au centre, leur reine. À l’aide de leurs pattes, elles s’arriment les unes aux autres en une grappe vivante, dont le dernier rang bat continuellement des ailes pour garder la chaleur ambiante. Quand elles sentent le froid les gagner, elles sont remplacées par leurs sœurs, et ainsi de suite, jusqu’au retour du printemps.

Outre cette fonction de préservation, leur aptitude à générer de la chaleur constitue aussi une mesure défensive. En effet, si les abeilles européennes attaquent traditionnellement les prédateurs tels que le sphinx tête-de-mort en leur injectant le poison contenu dans leurs dards, certaines espèces peuvent aussi les brûler vivants. Leur stratégie veut qu’elles attendent que ces derniers – comme les frelons – pénètrent dans la ruche et commencent à piller le miel. Puis, elles s’amassent pour l’empêcher de bouger, avant de battre les muscles de leurs ailes, brûlant ainsi le géant dans son propre corps. Si les abeilles sont plus résistantes à la chaleur, certaines meurent avec leur ennemi, mais la logique de l’espèce dicte ce sacrifice. Au sein de leur royaume, tout individu est tenu de se sacrifier pour assurer la pérennité de la ruche.

5. Une ruche qui se porte bien est majoritairement femelle

La sous-espèce d’abeille européenne étant un insecte social, les ruches en bonne santé comptent environ 60’000 ouvrières, contre seulement 500 faux bourdons. Surdimensionnés, oisifs, les mâles passent leur journée à se nourrir du miel des rayons et à butiner pour leur seul bénéfice. Ils ne récoltent ni le pollen qui les nourrit, ni le nectar des fleurs pour créer le miel, et ne sont pas dotés de dards pour défendre la ruche des parasites – guêpes, frelons ou abeilles étrangères. Par ailleurs, à l’inverse des cireuses et des nourrices, ils n’ont pas les organes nécessaires pour créer la cire ou pour sécréter le lait, ou «gelée royale», qui sert à nourrir les larves et les nymphes.

De fait, leur raison de vivre est purement reproductive. Sur leur masse, seule une poignée fécondera la reine lors du vol nuptial à la fin de l’été, avant de mourir pendant l’accouplement, l’abdomen se détachant avec les appareils génitaux. Cette vocation accomplie, les ouvrières massacrent tous les mâles survivants en un jour. Les ouvrières les transpercent de leurs dards et barrent l’entrée de la ruche aux survivants qui sont parvenus à fuir l’hécatombe, où ils meurent de faim et de froid. De cette manière, les ouvrières protègent les réserves de miel pour la venue de l’hiver, avant qu’un nouveau cycle ne recommence au printemps, avec une nouvelle génération de naissances d’ouvrières et de faux bourdons en mai.

 

Un passeport pour vos promenades

Couverture de «Passeport nature: guide de détermination»

Destiné au grand public, le Passeport nature se glisse facilement dans une poche pour partir en excursion. Ce guide de détermination permet de reconnaître facilement les plantes et les animaux de notre région, et d’en savoir plus sur leur mode de vie.

 

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